La grande ville (photos et textes)

La grande ville

On a beau dire que l'ennui vous engage à aimer, l'envie quant à elle, vous séduit à vous distraire.

Je me pris soudainement d'excitation à aller promener mes souliers de campagne tel un scarabée dans la grande ville éclairée des hommes.

L'air s'étranglait dans les rues reluisantes aux vitrines suspendues. Le grondement des carcasses à moteur me dépassait par dessus l'épaule, comme si leur cavaliers souhaitaient démontrer leur puissance et ainsi s'élever au sein du troupeau. Les longs moments de silence me manquaient comme une pompe à oxygène. Les grandes cages bien montées vers le nouveau ciel se remplissaient et se vidaient à leur tour, un estomac d'acier en pleine digestion, le système vital, y a pas à dire...

Au niveau zéro et dans le pas, hommes et femmes s'agitent jusqu'au trottoir d'en face sans aucun signe de reconnaissance de l'espèce affective. On dirait de grelots dans la tempête de mai.

Leur appendice buccale semble se rejeter dans l'inutile car aucun son ne s'invite à en sortir. Peut être remporte-t-il en son vaste intérieur un mensonge à se taire et qu'ils s’alimentent ainsi, eux les hommes.

En prenant une certaine hauteur, les yeux s'organisent par deux, à déborder d'intentions comme un serpent à la chasse. A tous moments les liaisons se font au travers d’une boite à résonance d'où sortent quelques syllabes de confidences. Il est peut être devenu plus intéressant de se réchauffer l'âme par la seule oreille disponible, le cœur lui, n'a qu'à attendre.

Alors le jour disparait en plein chagrin dans la rondeur de la lune, le dernier tram vient saluer le cimetière, Les lambeaux de linge sale flottent doucement aux façades tristes engloutient de quelques familles. on entend miauler en résonance la pauvreté du vieil homme accroupi.

Les lumières persistent sous la pluie, quelques vies disparaissent dans le noir profond de la nuit, le mystère des hommes résiste.

Julien Deper Bruxelles le 23 avril 2018 22h30